La dysplasie de la hanche chez le chien

L’importance d’une détection précoce : être proactif !

La dysplasie de la hanche est une laxité anormale de l’articulation coxo-fémorale entrainant pendant le jeune âge une subluxation à l’origine d’une dégénérescence articulaire : synovite, fissure du cartilage, comblement acétabulaire, déformation de la tête fémorale et développement ostéo-arthrosique.

Cette affection concerne les chiens en croissance ou jeunes adultes (laxité ligamentaire ou capsulaire)  ou le chien plus âgé (arthropathie dégénérative). Les chiens de petite taille (<12kg) sont plus rarement affectés et les jeunes chiens de races moyenne à géante sont souvent asymptomatiques ou présentent des signes cliniques légers. Ainsi les signes d’arthrose de hanche évidents à la radiographie (examen le plus fréquemment réalisé par les vétérinaires) sont rarement visibles avant 12 mois, limitant les options thérapeutiques.

Le diagnostic de dysplasie de hanche doit donc être le plus précoce possible pour que le patient puisse bénéficier de toutes les options thérapeutiques. Cela implique une sensibilisation de tous les acteurs (éleveurs, propriétaires et vétérinaires) dans le suivi de croissance des chiots à forte prévalence de dysplasie de hanche : berger allemand, rottweiler, labrador, golden retriever, saint-bernard, alaskan malamut et colley. Nous verrons par la suite que chez les plus jeunes (<2-5 mois), le diagnostic de dysplasie n’est pas une certitude mais une prévision/probabilité minime à forte de cette affection.

L’examen orthopédique

Rappel : tout examen orthopédique doit être accompagné d’un examen clinique général et neurologique complet. Le diagnostic différentiel d’une boiterie associée à une douleur de la hanche chez le jeune animal inclut : panostéite, luxation de la hanche, fracture du bassin, OCD, luxation de rotule, rupture du ligament croisé crânien ou atteinte neurologique...

Anamnèse : les signes cliniques décrits par les propriétaires seront variables selon l’âge du patient.

•    <5 mois : souvent asymptomatique

•    5 mois : réduction d’activité, difficultés au lever, fatigabilité en promenade, perte de volonté de monter, « bunny hopping » = course « comme un lapin » avec les 2 membres postérieurs simultanément

•    12-16 mois : moins de signes cliniques (diminution de la laxité articulaire par fibrose articulaire et développement de la masse musculaire) malgré le développement arthrosique

•    Adulte : boiterie plus classique secondaire à l’ostéo-arthrose de la hanche

À distance :

•    Au repos : hyperextension des tarses, appui asymétrique (soulagement du côté douloureux), aplomb anormal médial ou latéral

•    À la marche : report du poids vers les membres thoraciques, raccourcissement de la foulée, démarche chaloupée des membres pelviens (balancement du bassin en rotation +/- abduction des membres pelviens)

•    À la course : « saut de lapin »

Rapproché : consiste en des manipulations (flexion/extension/rotations) et palpations pouvant mettre en évidence une amyotrophie (fessiers et cuisses notamment), douleur à l’extension des  ou d’une hanche(s) (nb: attention à la surexpression clinique chez le jeune patient inquiet qui refuse les manipulations notamment en décubitus latéral)

 

Manipulation sous anesthésie

A.      Manœuvre d’Ortolani : réalisée en décubitus dorsal ou latéral. Elle est considérée comme une manœuvre de réduction. Une pression est exercée à partir du grasset en direction de la hanche avec un mouvement d’adduction puis d’abduction permettant de définir des angles de réduction et de subluxation de la hanche. Cet examen met en évidence une hyperlaxité des hanches en faveur d’une dysplasie coxo-fémorale. Un test négatif témoigne de l’absence de laxité passive (absence d’étirement capsulaire ou ligamentaire). Dans ce cas, nous pouvons être face à une articulation normale, mais le test sera aussi négatif si l’articulation est sévèrement modifiée.

B.      Manœuvre de Barlow : est également réalisée en décubitus dorsal ou latéral. Elle est considérée comme une manœuvre de luxation/subluxation. Elle consiste en un mouvement d’adduction progressive afin de luxer ou subluxer la tête fémorale et de déterminer l’angle de subluxation.

C.     Manœuvre de Bardens : réalisée en décubitus latéral. Le fémur est positionné perpendiculairement au bassin. Le pouce de l’opérateur est maintenu sur le grand trochanter et de l’autre main, une pression latérale est exercée sans abduction ou adduction. Toute élévation >1,2cm (0,5 pouce) est considérée comme anormale (Bardens positif). Attention ce test peut être douloureux/inconfortable lors de sa réalisation même en l’absence de douleur articulaire de la hanche.

Attention chez le patient adulte dysplasique, les signes d’Ortolani et Bardens peuvent être négatifs secondairement à une fibrose péri articulaire, un comblement acétabulaire ou une érosion du sourcil acétabulaire cranio-dorsal.

tableau 1

Examen radiographique

A.     Vues classiques :

Vue de profil : radiographie centrée sur les hanches et doit montrer une bonne superposition des ailes de l’ilum et des cavités acétabulaires. Cette incidence permet d’évaluer le positionnement physiologique de la hanche ou de qualifier la luxation de hanche si présente.

Vue ventro-dorsale est réalisée en décubitus dorsal : radiographie centrée sur les articulations coxo-fémorales et doit contenir l’ensemble du bassin et fémur jusqu’au plateau tibial. L’absence de rotation est contrôlée (ailes de l’ilium et acétabulum à la même hauteur, foramens obturés symétriques, fémurs parallèles et rotules centrées dans la trochlée fémorale). L’évaluation radiographique de la hanche implique :

  • Les surfaces acétabulaire et fémorale parallèles sur le 1/3 cranial
  • Espace articulaire coxo-fémoral étroit et régulier
  • Tête fémorale sphérique
  • Cavité acétabulaire creuse
  • Recouvrement d’au moins 50% de la tête fémorale par la cavité acétabulaire
  • Col fémoral creux et bien délimité
  • Absence d’ostéophytes et de sclérose sous-chondrale
  • Absence de ligne de Morgan (ligne radio-opaque localisée à la base de la tête fémorale et correspondant à l’insertion de la capsule articulaire coxo-fémorale)
  • Angle de Norberg-Olson supérieur ou égal à 105° (formé par l’intersection de la droite reliant les 2 centres de têtes fémorales et de la droite reliant le centre de la tête fémorale au rebord cranial de l’acétabulum ipsi-latéral)

B.      Vue en distraction :

Elle est réalisée sous anesthésie. Un distracteur est positionné entre les 2 cuisses. L’opérateur exerce un rapprochement des 2 grassets et crée un effet de bras de levier qui révèle une laxité potentielle des hanches. Cela permet un calcul d’un indice de distraction :

•    DI<0,3 très faible probabilité de développer de l’arthrose

•    0,3<DI<0,7 

•    DI>0,7 est prédictif d’une coxarthrose à l’âge adulte

C.     Vue du rebord acétabulaire dorsal

 

tableau 2

Le traitement chirurgical de la dysplasie de hanche

A.     La symphysiodèse pubienne juvénile

•    Principe : technique qui consiste en la fermeture précoce de la plaque de croissance du pubis pour provoquer une bascule ventro-latérale des cotyles avec un sous-développement ventro-médial du bassin. La ventroversion des acétabulums améliore le recouvrement de la tête fémorale et la conformation de la hanche. Cette technique présente l’intérêt de traiter les 2 hanches simultanément.

•    Sélection du patient : elle doit être effectuée sur des patients <16 semaines même asymptomatiques. L’intérêt est ici d’agir avant le développement de l’arthrose. Un diagnostic radiographique précoce est nécessaire notamment via le calcul de l’indice de distraction.

•    Technique chirurgicale : approche ventrale le long de la symphyse pubienne. Une électrocautérisation (40W, 10 sec, tous les 2mm) permet la réalisation d’une symphysiodèse pubienne.

•    Post-opératoire : faible morbidité. Repos strict pendant 15 jours, puis une activité limitée et contrôlée pendant 2-3 mois.

•    Pronostic : les études montrent une diminution du développement d’arthrose en améliorant la conformation articulaire chez les patients traités au bon moment (idéalement 3, maximum 4 mois). Le pronostic est également plus favorable chez les patients ne présentant pas de dysplasie sévère au diagnostic.

B.     Double/Triple ostéotomie du bassin

•    Principe : technique permettant de réduire la laxité articulaire et d’améliorer la congruence articulaire par ventroversion de l’acétabulum.

•    Sélection du patient : le candidat idéal est âgé de 6 à 10 mois. Les patients de plus de 12 mois ont généralement des lésions arthrosiques trop avancées. Une arthroscopie de la hanche peut être recommandée pour un bilan lésionnel précis du cartilage. Les contre-indications de la technique sont :

  • Subluxation importante coxo-fémorale
  • Signe d’arthrose coxo-fémorale
  • Acétabulum comblé

•    Technique chirurgicale : La TOB/DOB est réalisée en décubitus latéral et implique 2 ou 3 ostéotomies :

  • Ostectomie pubienne par voie ventrale le plus proche possible de la jonction entre le pubis et l’ilium.
  • Ostéotomie de l’ischium dans le cas d’une TOB (permettant une rotation plus aisée chez les patients plus âgés).
  • Ostéotomie de l’ilium : par voie d’abord latérale classique, une ostéotomie juste caudalement à l’articulation sacro-iliaque est réalisée. Le segment acétabulaire est alors tourné et stabilisé à l’aide d’une plaque spécifique déterminant le degré de rotation.

•    Post-opératoire : repos strict pendant 4-6 semaines minimum avec suivi radiographique de la cicatrisation osseuse à 4 et 8 semaines. On conseille 2 à 3 semaines de délai pour une procédure identique controlatérale.

•    Pronostic : les complications les plus fréquentes sont le descellement de l’implant (vis notamment) et la réduction de la filière pelvienne. Le développement de la DOB et d’implants verrouillés ont permis de nettement diminuer ce taux de complication. Selon la sélection des cas, le pronostic est satisfaisant avec une congruence normale de l’articulation coxo-fémorale et un pourcentage de couverture de tête fémorale de 50 à 72%.

C.     Ostéotomie de la tête et du col du fémur

•    Principe : procédure de dernier recours dont le but est d’éliminer la douleur d’un contact os-os de l’articulation coxo-fémorale.

•    Sélection du patient : les indications sont identiques à celles de la prothèse de hanche, à savoir des signes cliniques ne répondant pas aux traitements médicaux et conservateurs et sans autres options chirurgicales applicables. Historiquement, cette technique est préconisée chez des patients <20 kg. Des études sur plateau de force ont montré de bons résultats indépendamment de la taille chez des patients avec une arthrose importante et une atteinte chronique.

•    Technique chirurgicale : voie d’abord de la hanche latérale conventionnelle. Ostectomie de la tête et col fémoral uni ou biplanaire selon la préférence du chirurgien

•    Post-opératoire : La gestion de la douleur est importante afin de favoriser la reprise de mobilité précoce. Un programme de physiothérapie doit être mis en place pour la rééducation post-opératoire afin de favoriser le plus tôt possible le renforcement musculaire.

•    Pronostic : la réussite de la procédure dépend du bon respect des tissus mous (muscles et capsule articulaire) ainsi que de la bonne section du col fémoral. Le soutien musculaire, la pseudo-arthrose et la fibrose péri-articulaire se développant en post-opératoire permettent une utilisation satisfaisante mais variable du membre.

D.     Prothèse totale de hanche (PTH)

•    Principe : procédure de dernier recours en cas de malformation coxo-fémorale ou d’arthrose avancée. Elle consiste au remplacement de l’acétabulum et de la tête fémorale par un implant prothétique pouvant être cimenté ou non.

•    Sélection du patient : la PTH est recommandée pour les patients avec des signes cliniques persistants et un inconfort chronique ne répondant pas à une approche conservatrice et pour lesquels les procédures chirurgicales précédentes ne sont pas applicables. Elle est généralement réalisée chez les patients >20kg mais des implants de petites tailles sont accessibles pour des patients <6kg. La PTH peut être mise en place dès 7 mois (prothèse non cimentée) ou 1 an (prothèse cimentée). Elle est préférée lorsque des lésions cartilagineuses rendent l’ostéotomie pelvienne contre-indiquée.

•    Technique chirurgicale : consiste en une section de la tête et du col fémoral permettant la préparation du fût fémoral puis la mise en place de la tige prothétique. Ensuite, l’implant acétabulaire est positionné et impacté après alésage.

•    Post-opératoire : classique avec repos strict de 4 à 6 semaines potentiellement variable selon le type d’implant employé.

•    Pronostic : les résultats post-opératoires sont très satisfaisants dans 95% des cas. Les complications sont rapportées dans 5 à plus de 22% des cas selon leur définition. Elles sont rapportées dans 12-13% des cas pour les chirurgiens expérimentés : luxation, fracture fémorale, infection, descellement aseptique étant les plus fréquentes. Les complications de la PTH chez le chien sont non seulement fréquentes mais graves, conduisant à une révision chirurgicale, voire au retrait de la prothèse.

tableau 3

 

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